L’idiote et le connard

J‘étais tranquillement en train de lire la nouvelle BD de Vincent Bailly et Kriss, Partitions irlandaises, quand soudain, il est arrivé sans crier gare : l’irrésistible et insupportable besoin inconditionnel d’écrire. Tu sais, c’est exactement le même sentiment que tu as quand tu es sous l’eau, en apnée, et que tout à coup, il faut que tu respires, sinon tu mourras. Le besoin d’écrire me fait exactement le même effet. Le problème, c’est que ça fait plus de trois ans que je ne l’avais pas ressenti aussi intensément. J’ai eu envie d’écrire, j’ai eu l’inspiration pour quelques nouvelles, mais je n’ai pas eu ce besoin physique de coucher une histoire qui viendrait à moi sans que je puisse l’en empêcher.

Je ne saurais dire si ce besoin est arrivé à la lecture de cette BD, à moins que ce ne fut à la vue de l’œuvre d’art qu’est le roman La maison des feuilles qui s’est retrouvé entre mes mains quelques instants plus tôt et qui m’a mis dans un état d’excitation indescriptible tant je l’attendais depuis des semaines. A moins que ce ne fut le point final que j’ai mis au 2e jet de mon premier roman, que je traine dans mon sillage depuis plus de quatre ans sans savoir qu’en faire. C’est sans doute aussi provoqué par le fait que je l’ai enfin envoyé à ma lectrice la plus exigeante, dont je redoute l’avis depuis toujours. Ou enfin, pour finir, peut-être est-ce l’effet de la mélodie de Mansfield.TYA qui résonne en boucle dans ma tete depuis quelques jours : « Pour te dire que tes mains, que tes gestes et que tes yeux, pour te dire que tes seins, ton sourire et tes cheveux sont les choses que je veux ici et dans ma tombe… ». Peut-être un mélange de tout cela. Toujours est-il que je me suis plongée dans l’écriture sans voir l’heure tourner, alors que j’ai des enfants et que je ne peux plus me permettre de me déconnecter complètement de la réalité comme j’ai l’habitude de le faire quand je me plonge dans quelque chose qui me passionne vraiment.

Mais enfin, je suis en ce moment assaillie par une quantité astronomique de souvenirs qui m’obsèdent. Il n’y a pas trop de rapport entre eux, si ce n’est qu’ils ont tous le gout amer de l’inachevé, d’un point final qui n’aurait pas pu être mis. A moins qu’ils ne reflètent mon éternelle névrose, celle de ne pas supporter les fins. Ils sont probablement l’illustration du grand drame de ma vie : je ne termine jamais ce que je commence. Les époques et les gens se mélangent, mon age aussi, les histoires sont des histoires d’amour, d’amitié, de trahison ou de voyage, et l’autrice principale semble ne pas accepter qu’elles soient terminées. Alors elles me sont revenues, sous la forme de personnages plus ou moins identifiables, de situations plus ou moins vécues, de rêves plus ou moins formulés, et les mots se sont succédés les uns après les autres sans que je puisse les arrêter. En temps normal, une fois que j’ai planté le décor qui s’est imposé à moi et que mon corps m’a réclamé de rédiger, j’appuie sur pause et je prends un peu de temps pour dresser le portrait de mes personnages et des périodes qui vont s’écouler dans mon histoire. Mais là, je ne peux pas, l’urgence est encore là, je ne suis pas encore capable de m’arrêter d’écrire.

Et comme je suis toujours complètement obsédée par les histoires d’amour et de relations humaines, je me retrouve à écrire l’histoire d’une idiote et d’un connard, sur fond de musique punk, d’Atlantique nord, de chants de marins et de légendes arthuriennes. Je n’ai jamais dit que j’étais une fille originale.

Adulthood is a myth.

Mon cerveau est connecté en continue. C’est comme si j’étais sous acide, j’imagine, sauf que je peux pas comparer vu que j’ai jamais pris d’acide. C’est comme si je planais en permanence sous l’effet de mes pensées. Mes pensées ont un nom, elles ont une vie propre, je suis sure qu’elles ont même des rêves et une réalité bien à elles.

Mes pensées sont des rêves, mes rêves sont des histoires. Je suis shootée aux mots, droguée aux fantasmes, parfois je ne sais plus si je préfère être dans le vrai monde, ou dans le mien. Je peux m’envoler pour un rêve, je peux déconnecter tellement fort que tu ne peux même plus me parler. Je suis un puits d’infinité.

Le problème, ce sont les souvenirs. Ils s’accrochent à moi comme des milliers de toiles d’araignées couvertes de rosée, le matin, en automne. Ils sont tenaces, ils arrivent sans me prévenir, je n’ai même pas à les invoquer. Ils ne sont pas toujours tangibles. Si je me prends à plonger dans l’un d’entre eux, je peux être sure de quitter la réalité du monde et de voguer dans un entre deux qui mélange ce qui est vraiment arrivé à ce que j’aurais aimé qu’il arrive. J’en arrive à ne plus faire confiance à ma mémoire, parfois, elle qui est pourtant si précise quand elle le veut bien. C’est comme si elle avait joué et rejoué mille fois une scène dans ma tête et qu’à la fin, elle ne savait plus très bien ce qu’elle avait projeté et ce que j’ai vraiment vécu.

Le problème, c’est ce mec, auquel je pense systématiquement à chaque fois que j’écoute The Smith. C’est pavlovien je crois. Je ne peux pas lancer Heaven Knows I’m Miserable Now ou This Charming Man sans que m’apparaissent ses yeux bleus et sa silhouette élancée dans son stupide pull vert et blanc. Trois ans à attendre qu’il ne se passe rien, pour finir sur un message en allemand auquel j’ai jamais rien compris.

Le problème, c’est ce champ de blé à perte de vue, que j’ai créé dans ma tête en séance de sophrologie et qui est si précis, si efficace qu’il suffit que j’ai une crise d’angoisse pour le voir surgir comme un coup de poing devant mes yeux, et j’y suis comme si j’étais dans mon salon, et je marche vers un arbre noir et sec, qui porte parfois des feuilles et parfois non. Et selon mon état mental à ce moment là, le temps est à l’orage, ou pas. Le soleil peut m’éblouir. Il fait gris, il n’y a que le blé battu par le vent ou au contraire une immensité de fleurs bleus et rouges qui pointent vers le ciel. Ce champ existe, dans ma tête.

Le problème, ce sont ces morceaux de moi-même que j’aimerais laisser derrière moi lorsque ma vie avance mais qui sont toujours là, accrochés à mes talons et que je vois encore quand je regarde derrière moi. J’aimerais arrêter d’oublier d’aller acheter du pain alors que je continue de penser à cette douleur d’avoir été oubliée par cette fille du jour au lendemain, t’es dans la vie de quelqu’un et soudain t’existes plus. Et si j’y pense trop fort, je replonge et plus rien n’a de sens, les pensées se bousculent, je fais des phrases dedans et je perds pieds avec la réalité.

La réalité est un mythe à elle seule.

Why do I give valuable time
To people who don’t care if I live or die?

En attendant Godo

C’est l’histoire de deux mecs. Et ils attendent.

Hang the blessed DJ
Because the music that they constantly play
It says nothing to me about my life

C’est l’automne.

C’est la saison des noix, des soupes au potimarron, des thés noirs bien chauds et du tricot.

C’est la saison de Samhain, des pleines lunes revigorantes et des rituels apaisants.

C’est la saison des nuits qui rallongent, des feuilles mortes et du vent d’ouest qui se réveille.

C’est la saison où tu dois arriver.


Il y a six ans, je suis tombée amoureuse.

Je savais déjà ce que c’était, je connaissais bien l’amour, je l’avais vécu mille fois. J’ai toujours recherché l’Autre, car contrairement à ce que dit Sartre, ce n’est pas mon enfer. Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours détesté être seule. C’est difficilement avouable, dans une société où on te crie à la gueule que tu dois apprendre à vivre seule, que tu n’as pas besoin d’un-e autre pour être complète, toi-même, heureuse. Moi, j’ai besoin d’un-e autre. Dans les questionnaires idiots que l’on remplissait quand on était ados, à la question « quelle est ta plus grande peur », je répondais toujours « le vide, l’enfermement, la solitude ». Ce qui au fond, est peu ou prou la même chose.

Sauf qu’à 23 ans, après une relation longue et que je n’arrivais pas à finir justement parce que j’avais peur d’être seule, je goûtais enfin à la saveur de la solitude. Je savais que ça ne durerait pas, qu’au bout de quelques mois j’en aurais marre et que je repartirais sur les chemins du désespoir d’être seule que j’avais vécu toute mon adolescence, mais à ce moment précis de ma vie, j’étais très heureuse. J’étais seule et heureuse. C’était peut-être le seul moment de ma vie où je ne voulais pas être amoureuse.

Evidemment, c’est le moment qu’il a choisi pour arriver, lui. Mais il ne pouvait pas savoir.

Il ne pouvait pas savoir qu’il me ferait rire dès les cinq premières minutes à mes cotés.

Il ne pouvait pas savoir que son sourire et ses yeux bleus me bouleverseraient.

Il ne pouvait pas savoir que j’aurais envie de passer ma main dans ses cheveux jusqu’à l’engourdissement.

Il ne pouvait pas savoir qu’il était le premier garçon dont l’avis politique ne me donnerait pas envie de lever les yeux au ciel, mais au contraire de l’écouter parler.

Il ne pouvait pas savoir qu’à 17 ans, j’avais décrit mon amoureux-se idéal-e et qu’il lui collerait parfaitement.

Pour la première fois de ma vie, je ne me suis pas emballée, j’ai attendu. Pas très longtemps.

En six ans, on a gravité l’un autour de l’autre comme deux planètes. Lorsqu’on était séparés physiquement, on souffrait autant l’un que l’autre. On a vécu mille épreuves qui nous ont fait grandir. Lorsque j’ai vécu 8 mois aux Etats-Unis et que ça a tenu malgré le manque indicible, j’ai su.

‘Cause we’re lovers, and that is a fact
Yes we’re lovers, and that is that

Je me demande à quoi tu ressembleras, quelle genre de personne tu seras. Si tu préfèreras les glaces à la vanille (comme moi) ou au chocolat (comme lui). Si tu aimeras autant les Smiths que moi. Si tu sauras danser, comme lui, ou si préfèreras t’allonger sur ton lit pour écouter. Si tu aimeras plutot les garçons, plutot les filles, les deux, ou aucun. Si tu joueras de la guitare. Si tu seras plutot réservé-e ou plutot sociable.

Et même si ce monde est laid, moi je veux te montrer que toute sa beauté n’a pas disparu. Qu’on peut trouver du beau dans chaque personne, qu’il suffit d’écouter. Qu’on peut marcher dans la foret, nager dans la mer, s’allonger sur le sable et se sentir vivant-e. Que même si on ne saura jamais voler, on peut toujours rêver tout son saoul, promis, c’est presque pareil, qu’on peut passer la journée à lire le meilleur livre du monde en buvant du thé et en caressant son chat et que ça suffit à être heureux-se.

Je veux que tu ressentes, aussi fort que je ressens. Que tu sois aimé-e et que tu aimes, aussi fort que j’aime et que je suis aimée. Que tu sois entourée comme je suis entourée. Que tu connaisses la bienveillance, la bonté, la douceur, la joie de vivre, le rire, mais aussi que tu sois révolté-e, en colère, triste aussi, pour que ça te porte comme ça nous porte au quotidien, que ça te donne des ailes pour changer le monde comme on essaie de le changer pour toi, que tu ne laches rien, que tu sois aussi enragé-e que nous.

Je veux qu’on sache te rendre heureux-se.

Chroniques de la vie ordinaire, ou l’angoisse de la page blanche.

Avec l’écriture, j’ai toujours eu deux phases, plus ou moins longues chacune selon les périodes de ma vie : soit je suis hyper productive, j’écris à chaque moment de temps libre, j’y pense en continu, dans mon lit, en voiture, en balade, même quand je lis. Mes personnages fourmillent dans ma tête, je leur invente cinquante vies et cinquante situations différentes et ils m’accompagnent au quotidien. L’été 2016 fut de cette phase là, où j’ai été si productive que j’ai quasi écrit mon livre en deux mois.

Soit c’est la page blanche, la déconnexion totale, celle où il ne se passe soudain plus rien, nulle part, ni dans mes romans, ni dans mes cahiers d’écriture. La seule chose que je continue de remplir inlassablement même pendant cette phase improductive (car c’est une question de survie, comme diraient les L5) c’est mon journal intime. Mais en dehors de ça, toute forme de créativité scriptique (j’invente ce mot ok?) a disparu. Et c’est très bizarre, parce que ça ne m’empêche bien évidemment pas de continuer mes rêveries et mes aventures internes, mes histoires dans ma têtes et mes conversations mentales.

Le problème, c’est que cette année, cette phase dure depuis l’hiver dernier et je la trouve un peu longue. Je sais que le contexte joue pas mal, et l’année 2018-2019 (oui depuis que je suis prof, je compte en année scolaire, m’en voulez pas) fut une année où j’ai pas mal eu besoin de me concentrer sur moi-même, une sorte d’année de transition mentale assez importante, comme si c’était l’année où j’étais devenue adulte. Moi, je ne savais pas qu’on devenait adulte du jour au lendemain comme ça, je croyais que ça se faisait en douceur, après l’achat de sa première voiture ou sa première déclaration d’impots. Je pensais qu’on s’en rendait même pas compte, que tout à coup les trucs qui nous semblaient débiles et chiants étant enfants étaient soudain importants et qu’on savait les gérer miraculeusement. Quand j’ai eu mon concours et que j’ai commencé à enseigner, j’ai flippé, j’ai pensé que tout le monde allait finir par se rendre compte que c’était pas possible, que j’étais qu’une ado, que j’étais pas capable d’avoir une telle responsabilité comme ça, alors que paradoxalement, une fois dans ma classe c’est totalement naturel d’être là, je sais ce que je fais. Mais je me sens toujours comme une ado avec 25 enfants à stimuler (et j’aime bien ce sentiment).

Bref, je m’égare, pardonne-moi cher lecteur (tu es toujours là?). J’ai l’habitude de te faire lire des chroniques littéraires, des critiques et des analyses de choses spécifiques, et voilà que tu te retrouves à lire l’analyse en détail de ma page blanche de l’année 2019. J’en suis vraiment navrée.

Je sais, mon pote.

Je n’ai donc rien écrit de pertinent depuis huit mois, et à chaque fois que j’y pense, ça m’angoisse et je n’arrive même pas à ouvrir mon document word pour avancer sur mon roman. Ma théorie à ce sujet, pour en revenir à cette année de transition de l’âge adulte que je suis en train de traverser, c’est que mon roman parle justement de tout ça, mais que j’en suis restée à une partie qui traite de la vie d’étudiants de mes personnages et que je n’arrive plus à écrire dessus. Je crois que cette partie de ma vie est officiellement terminée depuis un an. Et là, je suis en train d’accepter que ma vie a pris un nouveau tournant, que j’en ai ouvert un nouveau chapitre, chapitre que n’ont pas encore entamé mes personnages.

Je vous ai dit que j’écrivais en fonction des phases de ma vie, aussi?

Je ne le savais pas, je viens de le réaliser après un été entier d’introspection à essayer de comprendre ce qui bloque dans cette période sombre de la page blanche (bel oxymore).

Je crois qu’il est temps de commencer quelque chose de nouveau, quitte à mettre ce deuxième roman en suspend, lui aussi. C’est ce que j’avais fait pour le premier, quitte à être capable de le reprendre plus tard, et c’est ce qui l’a sauvé je pense. Il est temps de m’atteler à un nouveau projet.

Concernant l’avenir de ce blog, en ce qui le concerne, il a encore je pense de beaux jours devant lui. Ces derniers temps, j’ai énormément de temps pour lire, donc je lis environ un livre par jour, et même s’ils ne sont forcément pas tous de qualité, j’ai quelques idées de chroniques que je compte bien te proposer incessamment sous peu. Et comme ce blog n’est pas qu’un blog de lecture, il y a d’autres analyses que j’aimerais te soumettre bientôt. J’aimerais bien te parler un peu musique, aussi.

Toi, j’espère!

Donc, reste dans le coin, d’accord cher lecteur?

Dix livres qui ont marqué ma vie

… Genre j’ai 90 ans.

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Oui je sais, ce titre est très prétentieux.

Harry Potter – J.K. Rowling


C‘était les vacances de février (impossible de me souvenir si j’étais en CM1 ou en CM2 par contre…). J’étais partie au ski avec ma mère et mes frangins, comme chaque hiver, mais, malheur, j’avais oublié de prendre un livre afin d’apprécier les soirées blottie dans le canapé ou le lit superposé du studio de location. Sauvée par ma mère, qui avait apporté un livre qu’une amie lui avait prêté :
– Il parait que c’est pas mal…
Pas mal, en effet. Tellement « pas mal » que mes deux frères et moi nous le sommes prêtés à tour de rôle (un vrai supplice) tant le livre nous a tenus en haleine, tant nous avons plongé dedans, tant nous l’avons dévoré. Ainsi que ma mère, du coup. Une vraie contagion familiale…
Par la suite, je me souviens avoir lu les trois tomes suivants, qui étaient déjà sortis en poche. J’ai reçu le tome 5 pour Noel 2003 (une longue agonie d’attente…). Pareil, un livre pour quatre, on avait chacun nos marque-pages dedans! Je ne sais pas pourquoi d’ailleurs mais ce fut moi la « collectionneuse » d’Harry Potter, c’est moi qui les demandais à chaque fois en cadeau.
Mille raisons font que cette saga a marqué mon adolescence, des raisons sans doute redondantes tant elles sont similaires à celles d’autres personnes. Je me suis attachée aux personnages, au fait qu’Harry pouvait être n’importe quel enfant de notre monde, ce qui m’a donné à croire que moi aussi je pouvais vivre des aventures extraordinaires. Je me suis fortement identifiée à Hermione, cette « Mademoiselle Je-sais-tout » aux cheveux très frisés, passionnée de livres, comme moi. Le monde merveilleux imaginé par Rowling m’a semblé crédible, fascinant, passionnant, et en grandissant, j’ai adoré l’analyser, y lire des messages politiques, des interprétations cachées. J’ai eu envie de devenir une sorcière de Poudlard, d’avoir mon animal magique et de suivre des cours de sortilèges et de Défense contre les forces du Mal. Sans compter que je suis tombée amoureuse de Ron T_T Bien sûr, par la suite, il y a eut les films, qui ont contribués à développer cette mythologie et à cette histoire d’amour étalée sur plusieurs années, mais les livres ont compté avant tout.

A la croisée des mondes – Philipp Pulman

Celui-ci fut un cadeau d’une de mes amies pour mes 10 ans. Là encore, le bouche à oreille avait bien bossé puisqu’on avait dit à sa mère que le livre était cool, et elle avait flashé sur le léopard de la couverture. Le… Léopard? Ah oui, pas de bol : elle avait pris le tome 2! Ma mère eut pitié de moi et m’acheta le tome 1, que j’ai dévoré en un rien de temps. Par la suite, ma meilleure amie et moi avons développé un délire assez énorme autour de l’existence des daemons, et on s’est inventé tout un monde parallèle dans lequel nous avions nous aussi des daemons… Ce jeu nous a suivi un certain temps, ce qui fait que jusqu’en 5e, j’étais considérée comme assez immature comparée à mes camarades. Mais je le vivais assez bien.
Au delà de ça, il m’a fallu un peu plus de temps pour comprendre l’aspect politique du bouquin, surtout le tome 3, que j’avais à l’époque trouvé très chiant à lire et que j’ai davantage compris en le relisant quelques années plus tard, au lycée, ce qui m’a permis de comprendre à quel point le livre était complexe et pertinent. Je viens il y a peu de finir le premier tome de la nouvelle trilogie de Pullman, La Belle Sauvage, ce qui m’a donné l’agréable sensation de retrouver de vieux amis tout en savourant pleinement cette fois les multiples sens de l’ouvrage.

Le Livre des Etoiles – Eric L’Homme

Celui-ci fut (exception) un cadeau reçu par mon frère a un anniversaire par l’un de ses amis (on avait décidément des potes plutôt doués pour choisir les livres). Presque ex-aequo avec « La Quête d’Ewilan », mais je dois avouer que j’ai été autrement plus marquée par cette trilogie car c’est un amour que j’ai partagé avec mon petit frère, nous en étions fan tous les deux. Tellement fan que l’on se refaisait l’histoire en mode jeux de rôle et tout le bazar. Cette histoire me fascinait tellement que je l’imaginais vraie, et je m’étais persuadée que le Pays d’Ys existait vraiment, d’ailleurs j’étais amoureuse de Romaric et je comptais bien le rencontrer en vrai, ma gueule (mais c’est pas pour ça que je suis venue vivre en Bretagne par la suite, promis). Mon frère était amoureux d’Ambre, lui, du coup c’était bien pratique, lui pouvait incarner Guillemot et moi Coralie. Que voulez-vous, les choses sont très binaires quand on a 10 ans. Certes, avec du recul, je suis totalement consciente que cette série est vraiment trop hétéro-centrée et que c’est un peu abusé qu’ils finissent tous maqués les uns avec les autres à la fin mais bon, je l’aime quand même d’amour, je n’y peux rien.
Cela dit, la magie inventée par L’Homme me semblait très logique et bien plus crédible que celle d’Harry Potter (chacun son truc, que voulez-vous).
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Mon idée du Pays d’Ys.

Quatre filles et un jean – Ann Brashares

Encore une saga dont je vous ai déjà parlé sur ce blog, et ce n’est pas pour rien, mais Quatre filles… a marqué mon adolescence. Encore un livre offert par une amie pour mon anniversaire, que j’avais passé à l’hopital à cause d’une crise de migraines très violente. A mon retour, elle m’avait laissé ce livre. Je me souviens l’avoir dévoré en entier le soir même. J’avais été marquée par le fait que l’une des héroines porte le même prénom que moi (oui, à 12 ans, on a besoin de ce genre de repères égocentriques… ).
Comme pour Harry Potter, le fait que la saga se soit déroulée sur plusieurs volumes, et donc plusieurs années a pu accentuer l’attachement que j’avais pour les personnages et leur développement. Je les ai longtemps comparées à certaines de mes amies, et encore aujourd’hui, quand je relis les tomes, c’est leur visages qui m’apparaissent.
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Oui, cette couverture super cheum est probablement sortie tout droit du 5e cercle de l’Enfer.

Tara Duncan – Sophie Audouin-Mamikonian

Okay, nous arrivons sur un terrain pentu. J’ai découvert Tara Duncan au CDI lorsque j’étais en 4e. Le livre était présenté dans les nouveautés. Je me souviens avoir trouvé la couverture étrange, mais le résumé m’avait tenté. Bien m’en a pris : je l’ai lu le soir-même et je crois avoir éteint la lumière vers 3h du matin parce qu’il FALLAIT que je le finisse. J’ai beaucoup ri, et c’est devenu mon nouveau livre préféré. Voilà pour les présentations.
Par la suite, comme c’est une saga, j’ai attendu chaque année la sortie officielle du nouveau tome, et j’ai eu l’occasion de rencontrer l’auteure à un salon du livre (et Pierre Bottero le même jour!), ce qui m’avait pas mal émue. Au lycée, j’ai commencé à fréquenter le « monde taraddict » (les autres fans, comme moi) sur internet, mais il a fallu attendre les études supérieures pour les rencontrer IRL. C’est un bouquin qui a donc marqué mon adolescence pendant des années parce que je le lisais et que j’adorais, mais qui a aussi été la source de profondes amitiés. Les taraddicts que j’ai rencontré sur internet, puis en séances de dédicaces de l’auteure à Paris sont devenus certains de mes meilleurs amis, voire plus encore puisque certain-e-s sont également des camarades de lutte politique…

Le vent de feu – William Nicholson

Cet espèce d’OVNI littéraire est arrivé entre mes mains le jour de mon anniversaire (encore!), je devais être en 6e. Un cadeau de ma mère cette fois! J’ai tout de suite plongé dans cet univers complètement barré, dystopique avant l’heure, et sacrément politique avec du recul. Je n’ai jamais rencontré d’autre personne ayant lu cette trilogie, mais moi elle m’a complètement claquée et je l’ai relue un nombre incalculable de fois. En grandissant, j’ai de mieux en mieux saisi la portée politique de l’oeuvre, une sorte de fable émancipatrice prônant l’abolition de tout ordre hiérarchique et autoritariste (tiens tiens…), pas forcément facile d’accès de prime abord tant l’univers est complexe. Ma référence en la matière pendant un bon paquet d’années, et sans doute le premier roman dystopique que j’ai lu.

Marche ou crève – Stephen King

On arrive maintenant au lycée. Il m’a été très difficile de sélectionner un Stephen King, qui est mon auteur préféré depuis cette époque. Beaucoup de ses bouquins m’ont marquée, comme Salem, qui fut le premier que j’ai lu (en 3e), ou Shining et La ligne verte, qui m’ont foutu une sacrée claque à l’époque. J’ai choisi Marche ou crève car c’est le premier bouquin qui m’ait provoqué une angoisse pas possible alors qu’il n’était pas un livre d’horreur à proprement parler. Toute l’intrigue repose sur l’évolution psychologique des personnages, ou comment on peut être parfaitement conditionné à choisir de participer à une course où l’issue est la mort ou la folie. J’ai été bouleversée par les personnages, le schéma de l’histoire, le fonctionnement psychique du héros, et cela m’a fait beaucoup réfléchir sur les lavages de cerveaux et les influences sociales. C’est sans doute un des livres qui m’a aidé à prendre conscience que je ne voulais pas faire partie d’un groupe trop puissant socialement, que je voulais continuer à me méfier des emprises de groupe, que je n’ai jamais voulu rejoindre des groupes (militants ou non) trop identifiés politiquement et que je continue encore aujourd’hui à cogiter au maximum sur tout ce que je lis, écoute, discute.

L’Attrape-Coeur – J.D. Salinger

Les filles c’est comme ça, même si elles sont plutôt moches, même si elles sont plutôt connes, chaque fois qu’elles font quelque chose de chouette on tombe à moitié amoureux d’elles et alors on sait plus où on est. Les filles. Bordel. Elles peuvent vous rendre dingue. Comme rien. Vraiment.

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Le bouquin qui a bien vécu sa vie de bouquin.
Encore un cadeau! Ce livre m’a été offert par mon grand frère Jean-Christophe le Noel de mes 17 ans. Il m’avait dit : « Ce livre était un de mes préférés quand j’avais ton âge… ». Sacrément bien ciblé. Je suis tombée à moitié amoureuse d’Holden et en même temps je l’ai à moitié détesté tant il me semblait con, mais si fascinant, aussi perdu que moi, ce qui était sans doute la raison pour laquelle il m’a plu. Il y a un coté très nihiliste dans ce livre qui collait parfaitement à mes angoisses et mes troubles adolescents, et j’ai aimé le style brut et agressif de Salinger, à une époque où tous les romans pour ados étaient trop puritains dans le genre, manquaient de réalisme, d’hormones, de violence, de brutalité, d’émotions, alors que j’étais traversée de toute part par toute ce bouillonnement. Et j’ai retrouvé cela dans ce livre, et ça m’a fait du bien. Je me suis sentie moins seule, moins incomprise, par un personnage, ou un auteur au moins. J’ai lu ce livre un nombre incalculable de fois.

Purity – Jonathan Franzen

J‘ai téléchargé Purity en ebook l’année de sa sortie après en avoir lu un article élogieux sur Télérama (j’assume complètement d’être un cliché d’intello). La critique m’a tentée, mais il m’a suffit de lire la première ligne du résumé pour être convaincue que je DEVAIS lire ce livre : « Purity, alias Pip, est une jeune américaine qui vit dans un squat à Oakland, en Californie ». Par le plus grand des hasard, le jour où j’ai lu cette critique, j’étais en train de préparer mon voyage d’un an pour ladite Oakland et ça me demandait une certaine préparation psychologique car j’allais être séparée de mon copain pour cette durée. J’étais également sujette depuis des mois au syndrome de la page blanche et complètement embourbée dans un roman qui n’avançait pas. C’était donc le moment idéal, me semblait-il, pour me plonger dans ce pavé de plus de 800 pages d’un auteur dont je n’avais jamais entendu parler.
Vous vous doutez de la suite : j’ai plongé la tête la première dans le roman, ai été happée par l’histoire complexe et enchevêtrée dans le temps, l’espace et les personnages et n’en suis ressortie que deux jours plus tard, complètement sonnée et encore un peu perdue par rapport à la réalité véritable. Suite à cette lecture, j’ai repris mon roman, effacé les trois quarts de ce que j’avais écrit et tout repris de zéro, ou presque. Un mois plus tard, je décollais pour San Francisco et il ne me restait plus qu’une cinquantaine de pages à écrire. Autant vous dire que Purity, en plus d’avoir été un coup de foudre littéraire énorme (j’ai par la suite dévoré deux autres pavés de Franzen) m’a aidé à surmonter ce blocage d’écriture, même si mon roman n’a strictement aucun rapport avec la choucroute. C’est comme ça, c’est la magie de Purity.

La Zone du Dehors – Alain Damasio

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Allez, on finit avec un dernier cadeau! Encore de mon grand frère (décidément, il connait bien sa cible) pour mes 28 ans, l’été dernier. Voici le résumé qu’il m’en a fait : « C’est un livre génial qui se passe dans une société futuriste où se déroule un combat entre les anarchistes et la démocratie. » Ok j’en suis.
Je crois que je l’ai lu au bon moment, ce moment de ma vie où tout allait trop vite et que je ne controlais plus rien ; et la Zone du Dehors, c’est un bouquin où les protagonistes veulent abolir le contrôle justement, où la liberté se doit de devenir absolue. L’intrigue et le style sont complexe mais bien, très bien écrits. C’est le bouquin le plus révolutionnaire que j’ai pu lire, et rien que pour cela, il vaut son pesant d’or. Ca restera pour longtemps ma référence en terme de science-fiction politique.

Voilà, camarade livrophile, c’est tout pour aujourd’hui, mais sache qu’il ne s’agit que d’une sélection, bien d’autres romans et essais ont marqué mon existence centenaire (non). Ca te donne cela dit une idée du personnage que tu suis avec assiduité sur ce blog.

The meta thing.

Je ne devrais pas trop tarder. Je suis là, assise sur cette plage sans nom, petit bout de nulle part perdu quelque part en Bretagne. Je ne saurais pas dire où je suis exactement. Autour de moi, du sable à perte de vue, et personne à part cette fille aux cheveux blonds décolorés qui regarde l’horizon. Je me demande pourquoi on fait toujours ça, perdre son regard dans l’horizon, alors que l’horizon n’est qu’un concept après tout. Un truc inaccessible ; tu as déjà essayé d’aller toucher l’horizon?

La mer est calme, tranquille. Pas un souffle de vent, pas un nuage, et les rayons du soleil de cette fin de journée semblent presque danser sur l’eau. J’y ai mis les pieds, un peu plus tôt, et cela a suffit à me convaincre que je n’en mettrai pas plus. Je ne sais pas pourquoi la mer me semble toujours glacée comme si elle n’était que la fonte d’un énorme iceberg qui n’en finirait pas.

J’avais apporté un livre, mais je ne l’ai pas ouvert. Pourtant, il n’y a rien que j’aime plus au monde que de passer une après-midi entière à lire allongée sur la plage, surtout quand la dite plage est vide. Et quand le livre a été écrit par Stephen King. Je ne l’ai pas ouvert, non pas que l’envie m’en manquait, mais parce que je n’en n’ai pas eu le temps. J’ai étendu ma serviette, ôté ma robe, révélant mon maillot de bain noir, et j’ai entreprit de mettre un peu de crème solaire sur mes tatouages. On était fin aout, mais je savais que le soleil et ma peau s’en foutaient bien, et je ne prenais jamais de risque avec mes tatouages. J’avais tout préparé : une playlist de l’enfer sur mon portable, avec Fauve, Green Day, The Clash et les Smiths. Je sais bien que j’ai du mal à grandir, et ma musique en est la preuve. J’écoute toujours les mêmes trucs depuis 10 ans, des trucs qui me rendent un peu nostalgique et un peu triste parfois, super heureuse souvent. J’adore mettre ça à fond quand je conduis et chanter à tue-tête ; j’ai l’impression d’avoir 16 ans. D’ailleurs, je dois les avoir encore, si tu veux mon avis. Grandit-on jamais vraiment? Je me le demande. J’étais donc là, avec ma crème solaire, ma musique et mon Stephen King, et c’est à ce moment-là qu’elle est arrivée.

– Stephen King, mmh ? C’est bizarre, moi aussi j’adore Stephen King. Vraiment très bizarre.

Je tournais la tête et je vis cette fille assise à coté de moi, comme si elle était apparue par enchantement. Je ne l’avais ni entendue arriver, ni vue s’asseoir. Pourtant, il n’y avait pas un bruit sur cette plage et je n’avais pas encore lancé la musique.

– Euh… Bonjour?

– Laisse-moi deviner… Tu dois écouter Rammstein. Ou The Clash. Oui, ça doit être The Clash, aucun doute.

– C’est Fauve, ai-je répondu en fronçant les sourcils.

– Ah! J’aurais dû y penser.

– On se connait?

Son visage m’était vaguement familier, comme si je l’avais connue à un moment de ma vie, il y a longtemps. Pourtant, je suis très physionomiste, et j’en étais d’autant plus troublée. Ses cheveux raides et blonds étaient mi-longs, très fins. Ils lui encadraient joliment le visage, qu’elle avait très fin également, un vrai visage de poupée. Sa bouche était bien dessinée, son nez droit et lorsqu’elle souriait, une unique fossette venait éclairer son sourire.

Une fossette, oui, comme Lily. Ou comme…

Hein?

Elle me lança un regard en coin, un peu malicieux.

– Alors, tu me remets?

– Tu ressembles beaucoup à l’héroïne de mon roman…

– Héroïne? Quel bien grand mot. Je ne vois pas pourquoi tu t’obstines à me présenter comme telle. Je n’ai pour ainsi dire pratiquement rien fait pendant la moitié de l’histoire.

J’avais envie de rire tant la situation était absurde. Venais-je de plonger dans un Stephen King? Ou dans cet épisode génial de Supernatural ou Métatron prend la direction de l’histoire? Le méta-truc? Ca n’avait pas de sens.

– Passons le moment où tu me dis que tu n’y crois pas, que quelqu’un te fait une blague et blablabla. De toute façon, à l’heure actuelle, tu es aussi en train d’écrire ça. Je parle à toi, dans ta tête et dans cette histoire. Tu es en train de l’écrire au moment où je parle. Tu mets des mots sur mes mots.

Ok, ça devenait flippant.

– Qu’est ce que tu fais là, du coup? ai-je demandé, décidant d’accepter l’absurde de la situation.

Après tout, le fait qu’il n’y ait pas un pète de vent sur cette plage aurait du me mettre sur la voie. Il y a toujours du vent ici.

– Je suis venue te tenir compagnie. J’ai l’impression que t’as besoin de parler.

– Ah bon, vraiment?

Elle me lança un regard de travers du style : « eh, oh, pas à moi, d’accord? »

– Très bien.

Je refermais complètement mon livre, ôtais mes écouteurs de mes oreilles et les rangeais soigneusement dans mon sac.

– Et mets-moi ce téléphone sur silencieux. Personne ne t’écrira aujourd’hui, de toute façon.

Je levais les yeux au ciel en soufflant, mais m’exécutais.

– C’est marrant, tu ne m’as pas rendue accro aux sms comme tu l’es. Tu n’as créé aucun de nous à fond sur son téléphone, en fait.

– A part Juliette…

– Ah ouais, Jul. Mais pas à ton point, quand même.

– Eh, oh, ça va!

– Je te juge pas, je te juge pas!

Encore heureux, ça serait le comble! Est-ce que je l’ai jugée moi, lorsqu’elle a fait certains choix?

Même si bon, techniquement, c’est moi qui les lui ai fait faire.

Elle me jeta un regard en coin.

– Tu viens souvent sur la plage toute seule?

– Non, c’est plutôt rare. Ça m’angoisse un peu d’être seule.

– Ah ouais? C’est étrange, moi j’aime bien.

– Je sais.

– Pourquoi tu n’as pas fait en sorte que je déteste ça, comme toi ?

– Tu n’es pas un copié collé de moi… Je m’inspire de ce que j’aime, de ce qui m’intéresse, de ce qui m’intrigue, de ce que je voudrais être ou ne surtout pas être pour vous créer. Genre, la musique qu’écoute Antoine, moi, je ne l’aime pas du tout.

– Ah ouais? Marrant.

– Je t’ai fait réservée. Je ne le suis pas.

– Tu as créé Mallory taré.

– Parce que je le suis tout autant. J’essaie de me gérer à travers lui.

– Ca marche?

– Pas vraiment.

Elle resta pensive quelques instants. Comment pouvait-elle être devenue cette belle personne plutôt sure d’elle, tranquille, bien dans ses pompes? J’avais du mal à croire que ça puisse être grace à ce que je lui avais fait vivre. Mais peut-être que si, après tout. Iels avaient tou-t-es tellement grandi.

Et moi, avais-je grandi?

Elle reprit la parole :

– T’aimes pas être seule mais tu adores conduire seule. Tu adores lire ; faut être seule pour lire. Tu écris tout le temps, aussi.

– Certes… Et tout ce temps, je le passe à m’inventer des histoires. Lire, c’est juste une excuse pour avoir l’histoire toute faite par quelqu’un d’autre, mais le film est quand même dans ma tête.

Je me suis toujours demandé comment pouvait bien être l’esprit et la vie des gens qui n’aiment pas lire. Ça a toujours été un mystère incroyable pour moi ; on ne peut décemment pas ne pas aimer vivre une histoire fabuleuse hors du monde réel, ce que nous offre à l’infini la lecture et l’écriture. Du coup, c’était forcément une histoire de cerveau. Mais je n’avais jamais réussi à visualiser le truc.

– Le monde réel est-il si dénué d’intérêt que tu aies à ce point besoin de t’en extraire ? Me demanda-t-elle alors tout de go.

Oh, comme je hais cette question.

– Le monde réel est génial, lorsqu’il est partagé avec de chouettes personnes. Et quand il te fait ressentir des trucs incroyables. Y’a rien de tel que vivre à fond ses émotions, et parfois y’a que les romans pour m’offrir ça.

– Pauvre Emma qui s’ennuie. Pauvre Emma qui a besoin de ressentir à fond tout le temps.

– Pas de sarcasme avec moi, Charlie.

– Mais enfin, on a tous besoin de décrocher parfois!

– Mon cerveau bouillonne tout le temps, de toute façon. Il faut que je le stimule sans arrêt, sinon il se met à penser à des trucs angoissants qui m’empêchent de dormir, de me concentrer et de vivre correctement.

Elle fronça les sourcils:

– Là, je comprends plus rien.

– Mes pensées sont là, quoi qu’il arrive. Du coup, si je m’évade, je peux leur donner un sens et les empêcher de prendre le contrôle de ma vie. De devenir envahissantes, si tu préfères.

– T’es folle.

– Autant que Mallory, ouais.

Elle se tut et nous gardâmes le silence quelques instants. J’en profitai pour prendre du sable dans ma main droite et le laisser glisser doucement sur mes jambes. Ca faisait comme la caresse soyeuse d’un chat, j’aimais bien.

– Et l’amour alors? Me demanda Charlie. Pourquoi m’as-tu rendue aussi nulle avec l’amour?

– On est tous nuls avec l’amour. J’ai passé mes trois années de lycée à essayer de comprendre ce que c’était que de tomber amoureux, pourquoi ça m’arrivait tous les six mois et pourquoi je ne pouvais pas passer plus de deux jours sans être amoureuse.

– Et alors?

– Et alors ça fait dix ans que je croyais avoir résolu la question, et voilà que toutes mes belles certitudes s’effondrent et que je dois recommencer à zéro. J’ai eu des raisonnements cartésiens, du genre « c’est une question d’hormones, de moment, de personne, c’est simplement la somme de l’instant T, de la personne A + B, du savant mélange entre le désir, le bien-être, l’attachement et l’obsession… Et d’autres trucs chimiques du cerveau. » Mais au final, tout ça me semble encore trop réducteur et n’explique pas tout.

– Mais si deux personnes s’aiment, ça suffit non?

– Pour la majorité des gens, ouais, j’imagine que ça suffit. Et ensuite, faut gérer la jalousie, le besoin de liberté, la libido ou l’absence de libido, le besoin de voir l’autre, le manque, les obsessions, les fantasmes, et vivre ensemble avec tout ce bordel. Mais ça, c’est en théorie.

– Comment ça?

– On m’a longtemps dit qu’être bien avec quelqu’un devait suffire, qu’on ne peut aimer qu’une personne à la fois, et que même si c’est normal parfois d’avoir des coups de coeur ou du désir, si tu commences à aimer quelqu’un d’autre, c’est qu’au final, ça va pas dans ton couple.

– Et c’est pas le cas?

– Je croyais, moi. Quand j’étais avec Timothée, je suis tombée amoureuse de quelqu’un d’autre et ça m’a fait douter du reste pendant les trois années qui ont suivi. J’ai pas arrêté de me mentir à moi-même sur ce que je ressentais, parce que ça voulait forcément dire que du coup, j’aimais plus Timothée alors que si, à ce moment-là, si.

– Je crois que j’ai jamais cessé d’aimer Antoine. Mais pas comme Mallory.

– Je comprends, et je confirme. Même si j’ai clairement cessé d’aimer des gens, y’en a certains que j’aimerai probablement toujours.

– Mais c’est pas le même amour, alors, lorsque tu aimes deux personnes?

– Ca l’est, et en même temps, ça l’est pas. Je veux dire, l’émotion, au fond, c’est la même. Les papillons, le désir, tout ça. Tu vois ce que je veux dire? Mais la projection, l’affection, le bien-être, c’est pas du tout les mêmes. Y’a l’amour coup de foudre, et y’a l’amour construit. Enfin, c’est ma théorie actuelle. De toute façon, l’amour, comme tout le reste, c’est un spectre et il a autant de développement possibles que de personnes qui le ressentent.

– Juliette dit que c’est le meilleur et le pire des sentiments

– Elle a raison. En même temps, c’est moi qui le lui ai fait dire. C’est le meilleur parce que bon dieu, que c’est kiffant d’aimer et d’être aimé. Ca te fait vivre à mille à l’heure, ça te donne envie de faire n’importe quoi, de te laisser entrainer par les sensations, c’est comme un énorme trip sous acide (enfin j’imagine que ça doit ressembler à ça). C’est le pire parce qu’il peut te mettre plus bas que terre dès lors que tu te sens délaissée, mal aimée, pas aimée, oubliée. Que t’as l’impression d’être la pire personne, de ne pas aimer comme il faut, de mal le montrer ou de trop le montrer. Que t’arrives pas à te mettre sur la même longueur d’ondes que l’autre.

– Mais quand tu l’es…

– Ah ben quand tu l’es, c’est le pied absolu. L’orgasme ultime. Le truc le plus fou du monde.

– Tu l’es, toi, sur la même longueur d’ondes?

– Ca dépend de qui et ça dépend des moments. En ce moment, c’est vraiment difficile. Je me sens soit trop aimée soit pas assez. Et je sais plus comment le dire ni le montrer. Et j’ai peur d’être trop envahissante. D’envahir l’un ou l’autre avec mes angoisses.

– Tu crois qu’on peut envahir quelqu’un d’angoisses?

– Ouais, c’est sur. Le besoin d’attention et d’être rassuré, c’est vraiment la pire chose du monde. D’un coté, c’est moi qui suis dans cette demande, qui me sens en insécurité émotionnelle. De l’autre, c’est moi qui doit le rassurer et être cette boule d’amour protectrice constante.

– Quel bordel.

Cette fois, c’est moi qui restai silencieuse. Mes pensées commençaient à se laisser aller, à vouloir avoir plus d’autonomie et à se faire la malle. J’avais décidé d’arrêter de vouloir définir ce que j’étais. Bisexuelle, polyamoureuse, demisexuelle apparemment, et quoi d’autre? C’est pas parce que l’oxygène était plus important que je ne pouvais pas pour autant vivre sans amour. Et même lorsque je l’avais, l’amour, je tombais encore amoureuse.

Quel bordel, oui, c’était le mot. Mais c’était bien trop bon pour rester raisonnable.

 


Léna MF – aout 2018.

 

Suivi de lecture et bullet journal

Dans mon article concernant mon utilisation du bullet journal en tant qu’outil d’organisation dans ma vie quotidienne et professionnelle (que tu peux retrouver ici si tu es passé à coté), j’ai rapidement évoqué les collections que j’ai créées exclusivement pour mon suivi de lecture. J’ai décidé de te les montrer plus en détail dans cet article.

 

Le suivi du 52 reading challenge

Bon, il y a 52 entrées, donc ça me prend quatre pages. J’ai organisé les choses de cette façon : le numéro de l’entrée, un cercle vide lorsque je n’ai pas encore lu de livre correspondant au thème, un cercle plein (noir) lorsque c’est le cas. En vert, le titre du roman choisi.

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Derrière, j’ai rangé le suivi par livres lus, ce qui m’évite d’avoir à recompter à chaque fois que je veux écrire mon bilan du mois. Dès que je finis un livre pour le challenge, je colorie un nouveau cercle. Donc à l’heure actuelle du jour d’aujourd’hui, j’en suis à 30, comme tu peux le voir sur l’image.

 

Un outil simple et rapide à utiliser (et puis j’adore faire ça, c’est joli je trouve ^^).

 

 

Le suivi de mes lectures de manière générale

J’adore cette idée de bibliothèque virtuelle piquée sur pinterest, qui permet de se rendre compte de tous les livres lus à l’année. J’ai donc tout bêtement recopié ce design, que je remplis au fur et à mesure de tous les livres que je lis, qu’ils fassent ou non partie du challenge. Je colorie en rouge les livres lus pour la première fois, en vert les livres relus et en orange ceux que j’ai commencé et abandonné (y’en a pas beaucoup).

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J’ai aussi rajouté dernièrement une bibliothèque virtuelle de tous les livres de Stephen King que j’ai lu (au cours de ma vie cette fois), afin de me rendre compte de ceux que je dois encore acquérir ou lire. J’ai envie de faire ça pour d’autres de mes auteurs fétiches qui ont écrit beaucoup de livres, comme Asimov ou Sartre.

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La liste de mes envies

Enfin, à chaque fois que je vois passer un livre qui me tente ou que l’on me conseille, je ne l’écris pas directement dans la bibliothèque (qui ne comprend que les livres réellement commencés ou prévus). J’ai pour cela une autre page de mon bujo, ce qui me permet de noter de manière aléatoire n’importe quel livre à lire… Un jour!

 

 

 

Voilà pour l’organisation des lectures! Si tu as d’autres façons de faire, comme je suis curieuse, n’hésite pas à me raconter ça dans les commentaires!

La reine de l’organisation (non)

Je suis une personne extrêmement désorganisée. Enfin non. Je suis organisée à ma manière, et jusqu’ici, ça me convenait très bien. J’utilisais un bon vieil agenda des familles pour noter mes voyages et mes sorties et tout le reste était entreposé dans ma tête. Si l’on met de coté le fait que je calcule absolument tout ce que je fais et que je n’arrive pas du tout à gérer mon argent, tout allait bien.

Mais un évènement inattendu vint briser ce merveilleux environnement mental.

J’ai réussi le CRPE et je suis devenue prof des écoles.

« Oh bah super », te diras-tu en lisant ces lignes. Oui, certes! Ma vie a radicalement changé depuis ce jour et n’a jamais été aussi agréable et sereine, j’en suis consciente tous les jours. J’ai l’impression que ce que je fais a un sens, je m’éclate, j’adore ma classe et je me sens enfin utile et à ma place!

Le problème vient plutôt de mon organisation. Maintenant, je dois être vraiment au clair, ne serait-ce que pour mes projets de classe, le suivi de mes élèves ou mes séquences. Je dois voir où je vais à long et à court terme. Jusqu’à la Toussaint c’était atroce, la panique à bord, je faisais n’importe quoi et je sentais que je ne voyais pas où j’allais. J’ai testé différents outils jusqu’à ce qu’après différentes phases de tâtonnement, je mette enfin la main sur l’outil ultime, l’outil parfait qui réunirait mon organisation perso et professionnelle, j’ai nommé le bullet journal (avoue que tu l’avais pas vu venir).

Je vais donc être la unième blogueuse (haha non je ne suis pas une blogueuse) à venir vanter les mérites organisationnels du bujo, entre deux articles de lecture.

J’ai passé pas mal de temps sur différents blogs et sur pinterest pour trouver mon organisation de bujo idéale, qui me permettrait d’inclure les choses à réfléchir pour ma classe, mon suivi d’élèves et mes trucs persos. Je voulais que chaque semaine puisse tenir sur une page afin de me permettre de tout voir en un clin d’oeil. J’ai donc opté pour la « dutch door », ce petit volet plié entre deux pages qui fait comme une troisième page entre les deux autres. Magique!

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Je voulais que ma semaine me permette de voir : mes taches journalières, mes objectifs, mes idées pour la classe et les trucs à penser, mon suivi d’élève mais aussi mon tracker d’écriture pour le roman, mon bilan de lecture de la semaine et mes idées d’articles pour le blog. CA FAIT BEAUCOUP J’AVOUE. Mais avec ce système ça rentre nikel et je m’y retrouve complètement!

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Dans mes dutch doors, il y a, selon les semaines :

  • Mon budget mensuel : ceci aussi est une petite révolution pour moi. En haut, je fais une grille tracker qui va de zéro à mon total mensuel (ma paye). En dessous, j’ai fait un petit tableau de toutes mes dépenses automatiques (loyer, courses etc). Je note chaque fois que j’achète quelque chose, et je colorie le tracker à chaque fois. Ca me permet de voir où j’en suis de mes dépenses et ce que je peux encore me permettre dans le mois ou pas… Et enfin, pour éviter toute dépense spontanée, j’ai un dernier tableau « wishlist » dans lequel j’écris chaque envie, que je note de 1 à 4 (1 = complètement accessoire, 4 = nécessaire). Je me donne ensuite une semaine avant de voir si j’ai toujours envie de l’acheter et si ça rentre dans mon budget.
  • Le suivi de mes élèves : les compétences à évaluer changent chaque période selon les séquences et ce que nous avons travaillé en classe. Au jour le jour (je fais peu d’évaluations somatives) je colorie la case de chaque élève selon la compétence travaillée (coloriée entièrement = acquise, coloriée à demi = en cours d’acquisition, non coloriée = non acquise ou non travaillée).
  • Le bilan du mois : chaque jour, j’écris un moment sympa de ma journée et je colorie la case qui suit selon un code couleur qui permet en un coup d’oeil de voir si ma journée a été globalement agréable ou non.

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Pour la page mensuelle, je voulais voir apparaitre :

  • Le calendrier du mois sous forme de cases
  • Un tracker de mes objectifs persos de l’année (écriture, blog, sport, méditation)
  • La liste des choses à faire dans le mois
  • Mes objectifs du mois
  • Un espace de notes

J’ai donc opté pour la double page mensuelle avec plein de couleurs parce que c’est joli et motivant!

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Enfin, le truc le plus kiffant du bujo c’est quand même cette liberté absolue qui permet de noter absolument ce que l’on veut quand on veut. J’ai donc, en plus de mes pages semainières et mensuelles, un suivi de mon 52 reading challenge et son tracker à chaque livre lu (on en est à 12 youpi), ma bibliothèque de livres lus (copiée sur pinterest car j’ai zéro talent graphique), le suivi de mes séries, une page pour les projets nécessitant de mettre de l’argent de coté (idée piquée à Maiwenn et c’est très motivant!), une page pour la liste des livres et des films qu’on me conseille… Etc.

Concrètement, pour moi, le bujo a deux énormes avantages :

  • M’organiser. Je l’ai dit et redit, mais vraiment, je procrastine beaucoup moins depuis que j’ai mon bujo. Chaque jour je note les tâches à faire (avant je faisais ça sur des bouts de papiers) et c’est tellement satisfaisant de les cocher lorsque c’est fait! J’ai même un code couleur selon que les tâches sont persos, pour l’école, pour l’ESPE ou neutres. J’avance beaucoup plus vite dans mes projets et je tiens bien plus sérieusement mes résolutions.
  • Me détendre. Les jours où je ne travaille pas, j’aime passer du temps sur mon bujo, le décorer, faire mes nouvelles pages, le remplir, écrire dedans… C’est devenu un vrai hobby, c’est kiffant!

 

Bref, bilan plus que positif pour cet outil merveilleux et magique!

Qu’est-ce que l’hypersensibilité ?

Avant toute chose, je précise que mes études en psychologie ne me permettent pas de me prétendre spécialiste. Cet article n’a donc aucune vocation scientifique et ne se base sur aucune approche psychologique, il ne s’agit que de mon témoignage personnel. Si toi, lecteur ou lectrice hypersensible, en lisant ce texte, tu ne te reconnais pas, ce n’est pas grave et ce n’est pas significatif car je suis convaincue que toutes les personnes hypersensibles ne partagent pas le même vécu et les mêmes problématiques. On peut en parler dans les commentaires ! 🙂

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Je l’avoue, je m’identifie beaucoup à Jess dans New Girl.

Je suis hypersensible. Mais quand j’étais petite, on me disait plutôt que j’étais une chochotte. On parle aujourd’hui de « forte émotivité », ou « intelligence émotionnelle » (j’aime bien ce terme parce qu’il est positif).

Tout d’abord, en ce qui me concerne, mon hypersensibilité se définit comme tel :

– Extériorisation de toutes mes émotions.

– Difficulté à contrôler ces émotions.

– Empathie à l’extrême (je pleure très facilement pour autrui).

– Situation émotionnelle provoquant des pensées parasites pouvant durer toute une journée (je n’arrête pas d’y penser).

– Choix basés sur l’instinct avant la raison.

– Imagination débordante (il se passe autant de choses dans la vie réelle que dans ma tête).

– Attachement rapide et parfois fusionnel.

Ceci s’accompagne chez moi d’importants troubles anxieux et d’une angoisse d’abandon.

Voilà pour la théorie. Maintenant, imagine une journée normale, où tu te lèves le matin et que tout va bien. Soudain, en sortant dans la rue, tu te fais insulter par un type. Cela suffit à te mettre de mauvaise humeur. Si tu as les mêmes réactions hypersensibles que moi, ta journée est fichue parce que tu vas passer la journée à te refaire la scène dans ta tête en te répétant toutes les phrases que tu aurais pu balancer à la gueule de l’agresseur. Ou alors simplement choqué-e par l’acte.

Imagine que cette réaction se produise à la moindre montée d’émotion.

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Je sais que tu vois ce que je veux dire, JD.

Ce type de contrariété peut arriver avec n’importe quelle émotion ; ça peut aussi être de l’euphorie. Quand je suis euphorique, j’ai juste l’air dans la lune – à vrai dire, j’ai tout le temps l’air dans la lune – car je me revis en boucle un moment agréable. Ca, c’est le coté positif de l’hypersensibilité. Quoi qu’il soit positif uniquement pour moi, car pour les autres, j’ai l’air à l’ouest et je suppose que ce n’est pas toujours agréable quand on me parle et que j’ai l’air de ne pas écouter.

Une Madmoizelle, sur un article sur l’hypersensibilité dit à ce sujet : « Nous autres hypersensibles ressemblons à une radio qui cale automatiquement sa fréquence sur celles des autres. » C’est absolument vrai, et je trouve que c’est une très bonne métaphore. C’est comme si je captais les émotions de toutes les personnes se trouvant près de moi, en particulier ceux qui me touchent, et que je les absorbais. Wikipedia dit que les hypersensibles ont une sorte de « sixième sens ». Pour ma part, je « sens » ce que les autres pensent de moi – en général, ça se voit comme le nez au milieu de la figure. Quand je sens qu’une personne ne m’apprécie pas, ça me met très mal à l’aise et je ne sais plus ou me mettre. Oui, parce que, qui dit émotions exacerbées dit spontanéité, dit chez moi exubérance. Puisque je suis incapable de gérer et contenir mes émotions, je les laisse sortir au gré de leurs envies. J’ai donc visiblement l’air excitée, dynamique ou au contraire maussade, déprimée… Quoi qu’avec l’âge, je gère plus ou moins de mieux en mieux tout ça – il paraît. Cela dit, je peux effectivement passer très vite d’un état à l’autre. Je ne suis pas la première que l’on qualifiera de susceptible ou de lunatique, j’espère qu’avec toutes ces explications vous comprendrez mieux les raisons de ces réactions extrêmes.

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Moi devant (au choix): un film triste, des gens qui s’embrassent, une personne qui a l’air abandonnée, mon chat qui miaule, mon copain qui me dit qu’il m’aime, un message gentil d’un proche, quand je pense à quelqu’un qui me manque… etc.

J’ajouterai à cela que chacun gère différemment son hypersensibilité. Ce que je veux dire, c’est qu’hypersensible ne veut pas dire naïf, mièvre ou idiot ; et que l’on peut être hypersensible et aimer regarder des films tristes, les films d’horreur et/ou les comédies romantiques. Rien n’est incompatible. En ce qui me concerne, j’aime énormément pleurer devant un film, mais ce n’est pas le cas de tous les hypersensibles. Je suis aussi une grande fan de films d’horreurs. Et ce n’est pas parce que je suis touchée facilement par quelque chose ou que je suis facilement blessée que je suis idiote…

Pour conclure, vous aurez compris qu’il y a de très bons cotés à être hypersensible : l’empathie, l’instinct, l’imagination, les sentiments positifs ; et d’autres foncièrement moins bons : la susceptibilité et le fait de prendre les choses très à cœur, les sentiments douloureux qui créent une souffrance à long terme, le fait d’être incapable de gérer ses émotions dans les situations complexes… Difficile de mettre par écrit ces sentiments, mais vous avez certainement compris l’essentiel.

Cet article relativement court était important pour moi car j’avais envie d’expliquer le plus simplement possible ma problématique émotionnelle. Je vous invite à venir en discuter dans les commentaires, si vous êtes également hypersensibles, si vous gérez ça différemment, si vous avez des conseils ou tout simplement des questions !

A lire aussi: Je suis hypersensible